Tous les articles par Jacqueline Collard

Les courants océanographiques perturbés par le changement climatique

Selon une étude publiée fin mars dans la revue Nature, le réchauffement climatique accélère la fonte des glaces dans l’Antarctique et l’augmentation de la quantité d’eau douce déversée dans l’océan, qui perturbe la circulation de retournement de l’Antarctique et qui s’accentue depuis 30 ans.

Cette perturbation de grande envergure risquerait de modifier considérablement les conditions météorologiques mondiales, le niveau des mers et la santé des écosystèmes marins, affirment des scientifiques, qui lancent un avertissement sévère sur les effets croissants du changement climatique.

La circulation de retournement ralentit, perturbée par la quantité croissante d’eau de fonte de l’Antarctique, rend les eaux moins salées, et donc moins denses ne leur permettant plus de couler avec la même force. L’un des principaux moteurs de ces schémas de circulation océanique est la production d’eau froide salée au large du Groenland et de l’Antarctique. Cette eau dense s’enfonce dans les profondeurs et alimente les courants océaniques profonds.

Cette circulation  » thermohaline » s’avère très importante pour les transferts de quantités de chaleur, d’oxygène, de carbone et de nutriments autour du globe. Les effets déjà identifiés sont les suivants :

  1. Les eaux froides profondes de l’Antarctique déplacent l’oxygène et les nutriments vers les océans Indien, Pacifique et Atlantique.
  2. Dans l’Atlantique, la circulation méridienne de retournement (AMOC : Atlantic Meridional Overturning Circulation) qui joue le rôle de thermostat mondial, transporte les eaux chaudes et salées vers le nord, ce qui contribue à créer un climat tempéré en Europe occidentale.
  3. Les eaux de surface deviennent plus froides et plus denses à mesure qu’elles s’approchent de l’Arctique, entraînant les courants en profondeur et contribuant à propulser le système.

Plus de détails :

https://www.nature.com/articles/s41558-021-01097-4

https://www.nature.com/articles/s41586-023-05762-w

CDHNU Résolution adoptée pour un environnement propre , sain et durable

Le 4 avril 2023, durant sa 52e session, le Conseil des droits de l’homme des Nations unies (CDHNU) a adopté une résolution relative au droit à un environnement propre, sain et durable.

Ce texte, parrainé par le Costa Rica, les Maldives, le Maroc, la Slovénie et la Suisse, a notamment pour objectif d’engager les États à adopter un cadre juridique efficace et des politiques à l’échelle nationale et locale pour garantir ce droit. Le 8 octobre 2021 avait marqué une étape décisive pour tous les acteurs engagés dans la protection des droits de l’Homme et de l’environnement. Le Conseil des droits de l’Homme des Nations Unies (CDHNU) a enfin reconnu le droit à un environnement propre, sain et durable comme étant un droit humain essentiel pour l’exercice des autres droits. Pour la première fois dans un instrument onusien, ce droit a été affirmé par la résolution 48/13, adoptée lors de la 48session du CDHNU.

ll garantit aux individus et aux peuples un environnement dont la qualité permet aux êtres humains d’avoir une vie digne et épanouie.Des années de plaidoyer de la société civile ont finalement abouti à cette avancée importante dans la lutte contre les effets du changement climatique, de la pollution et de la perte de biodiversité.

https://doi.org/10.4000/revdh.13063

L’infertilité : un enjeu de santé publique trop peu mis en évidence

Une méta-analyse (plusieurs centaines sur le sujet) rapporte dans la revue Human Reproduction Update *, la chute de la concentration de spermatozoïdes chez l’humain. Ils ont identifié des données disponibles dans plus d’une cinquantaine de pays, couvrant au total la période 1973-2018.

De 1973 à 2018, la concentration moyenne de gamètes dans le sperme est  passée de 101 à 49 millions par millilitre soit une baisse de plus de 50%. En France une naissance sur 27 résultait, en moyenne en France en 2020, d’une aide médicale à la procréation (PMA).

Les raisons : la pollution et les modes de vie seraient  à l’origine d’une chute accélérée de la concentration des spermatozoïdes chez l’homme. Ce déclin est désormais observé dans le monde entier, comme cette méta-analyse le met en évidence. Si l’âge reste le premier facteur d’infertilité en France, les causes environnementales, en particulier l’exposition à des perturbateurs endocriniens, sont de plus en plus considérées comme une thématique majeure des troubles de la fertilité.

Ces résultats confortent le rapport de synthèse publié mardi 4 avril, présenté par l’Organisation mondiale de la santé, qui alerte sur l’importante prévalence des problèmes de procréation : 17,5 % de la population adulte mondiale connaîtrait au cours de sa vie reproductive au moins un épisode d’infertilité (133 études menées dans toutes les régions du monde entre 1990 et 2021). Selon les estimations de la prévalence de l’infertilité finalement elles sont très proches entre les pays ayant des niveaux de revenus différents : elle est de 17,8 % dans les pays à revenu élevé, et de 16,5 % dans ceux à revenu faible ou intermédiaire. C’est donc une réalité mondiale dont on entend trop peu!

*https://academic.oup.com/humupd/article/29/2/157/6824414?login=false

https://news.un.org/fr/story/2023/04/1133922

Shanna Swan. Compte à rebours 15/09/2021 Editeur Marco Pietteur  Collection Résurgence

Welch BM, et al. (2022) Associations Between Prenatal Urinary Biomarkers of Phthalate Exposure and Preterm Birth: A Pooled Study of 16 US Cohorts. JAMA Pediatr.;176(9):895–905. https://doi.org/10.1001/jamapediatrics.2022.2252  

Chen Y, Xiao H, Namat A, Liu J, Ruan F, Xu S, Li R, Xia W. (2022). Association between trimester-specific exposure to thirteen endocrine disrupting chemicals and preterm birth: Comparison of three statistical models. The Science of the total environment, 851(Pt 2), 158236. https://doi.org/10.1016/j.scitotenv.2022.158236

Hagai Levine, Niels Jørgensen, Anderson Martino-Andrade, Jaime Mendiola, Dan Weksler-Derri, Maya Jolles, Rachel Pinotti, Shanna H Swan, Temporal trends in sperm count: a systematic review and meta-regression analysis of samples collected globally in the 20th and 21st centuries, Human Reproduction Update, 2022;, dmac035, https://doi.org/10.1093/humupd/dmac035

Les pesticides interdits en Europe continuent à être exportés dans le monde

En 2018, l’article 83 de la loi Egalim prévoyait l’interdiction, à compter du 1er janvier 2022 « de la production, du stockage et de la circulation de produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives non approuvées dans l’Union européenne pour des raisons liées à la protection de la santé humaine, animale ou de l’environnement ».

« Au moment de la loi Pacte, la droite sénatoriale, sous la pression des lobbys, est revenue sur cette interdiction, et l’Assemblée nationale a tenté de repousser ce délai à 2025, dans son article 18. Plusieurs élus ont alors saisi le Conseil constitutionnel, qui a déclaré l’article non conforme, et la date de l’interdiction a de nouveau été fixée au 1er janvier 2022 », relate le sénateur de l’Isère Guillaume Gontard.

Parmi les pesticides chimiques interdits dans l’Union européenne mais qui ont été fabriqués et exportés depuis ce territoire figurent notamment :

  • le dichlorophène ;
  • la cyanamide ;
  • l’herbicide paraquat.

Face aux conséquences des néonicotinoïdes sur la disparition des pollenisateurs, l’Union européenne décide d’interdire l’utilisation et la mise sur le marché de ces pesticides. À noter que les substances néonicotinoïdes interdites sont :

  • l’imidaclopride ;
  • la clothianidine ;
  • le thiaméthoxame.
  • En 2018, 81 000 tonnes de substances chimiques jugées hautement toxiques ont été exportées par l’Union Européenne. Parmi les 81 000 tonnes de produits chimiques exportés, 28 000 tonnes étaient du paraquat, l’herbicide soupçonné d’être en lien avec la maladie de Parkinson  41 pesticides chimiques interdits par l’Union Européenne continuent d’être fabriqués par des pays membres de l’UE pour être ensuite exportés.

Depuis le 19 décembre 2018, il est interdit de posséder, de vendre ou d’utiliser des néonicotinoïdes au sein de l’Union européenne.

Entre janvier et septembre 2022, les autorités françaises ont approuvé 155 demandes d’exportation pour des pesticides interdits en France et dans toute l’Union européenne (UE). Au total, 7475 tonnes de substances et produits phytosanitaires interdits ont été autorisées à l’exportation. Ces exportations concernent 14 molécules bannies de l’agriculture européenne en raison de leur dangerosité pour la santé et l’environnement. Une substance représente à elle seule près de 40 % des volumes : la picoxystrobine. Ce fongicide, utilisé dans les cultures de céréales et de soja, a été interdit en 2017 en raison d’un potentiel génotoxique et d’un risque élevé pour les organismes aquatiques.

Le gouvernement français a approuvé l’exportation de plus de 7400 tonnes de pesticides interdits depuis le début de l’année, malgré l’adoption d’une loi historique prohibant cette pratique. C’est ce que révèle une nouvelle enquête de Public Eye et Unearthed, qui met en lumière les failles de la nouvelle règlementation française. Pour mettre fin aux exportations toxiques, une interdiction au niveau de l’Union européenne est essentielle.

Et voilà que l’on découvre en ce début de printemps 2023 pour une étude consommateurs que : Des pesticides sont bien présents dans les produits alimentaires. En tout cas, dans les pots de confiture. Une étude 60 Millions de consommateurs montre que plusieurs pots de confitures de différentes marques contiennent des pesticides. Sur les 40 références analysées, « 15 molécules différentes d’insecticides et de fongicides » ont été retrouvées dans 22 des pots. Pire encore, certains pots contiennent des pesticides interdits (carbendazime et le thiophanate-méthyl).

https://lenvironnement.fr/dossiers/reglementation-et-politiques-environnementales/pesticides-interdits-union-europeenne/

Notification via le système RASFF (système d’alerte rapide européen Food et Feed)

 

 

 

Le plan Eau dévoilé

La raréfaction de l’eau est une problématique d’ampleur planétaire, la France pendant longtemps épargnée ne l’est plus.

Après une année 2022 inédite sur le plan de la météo, les premiers mois de l’année semblent suivre la même tendance. avec records de température, déficit de pluie, nappes phréatiques à sec , et pour ce début d’année cette sécheresse hivernale , des déficits de pluie, 2023 ne permet pour l’instant pas de redresser la barre. Les projections du rapport Drias de Météo France prévoient pour 2050 des records absolus de températures d’ici à cette date, avec une augmentation des températures estivales moyennes de 6 degrés Celsius. Sans une action décisive, le manque chronique d’eau ne trouvera plus de solution et le dernier rapport du Giec ne fait que le confirmer. En cette fin Mars, cela devient donc une priorité de la planification écologique engagée par le Gouvernement, ce plan permettra d’engager une gestion résiliente et sobre de l’eau dans un contexte de changement climatique.

Pour l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), 40 % de la population mondiale sera confrontée à des pénuries d’eau d’ici à 2050 et, selon le Global Water Institute, 700 millions de personnes pourraient être déplacées à l’horizon 2030 du fait d’une pénurie d’eau.

Donc il était urgent de prévoir ce plan Eau qui propose une cinquantaine de mesures, c’est avant tout un plan de sobriété et d’efficacité pour l’eau dans la durée. Mais déjà en 2019, lors des Assises de l’eau, le gouvernement s’était déjà engagé à diminuer les prélèvements dans les milieux, les nappes, les lacs, les rivières de 10 % d’ici à 2025 et de 25 % d’ici à 2035 sans que des mesures fortes n’aient été prises.

Parmi les objectifs: généraliser la « tarification progressive » de l’eau pour les usagers domestiques, l’eau était « indispensable à notre souveraineté alimentaire  expérimentée dans certains territoires depuis 2017. Notre consommation domestique directe quotidienne est évaluée à 146 litres en moyenne par personne, chaque jour. Au-delà d’un certain volume de base, le tarif augmentera pour dissuader les usages excessifs.

Parmi les mesures En France, « un litre d’eau sur cinq est perdu en raison des fuites, c’est inacceptable ». Pour y répondre et accompagner les territoires les plus vulnérables, 180 millions d’euros par an « d’aides supplémentaires des agences de l’eau seront dédiés au petit cycle de l’eau » dès 2024, (rallonge de 500 millions d’euros par an pour les budgets des agences de l’eau) est-il indiqué dans le plan.Ces « points noirs » où les taux de fuite sont supérieurs à 50%, sont au nombre de 170 en France, indique l’exécutif .L’été dernier, un document de l’Observatoire des services publics d’eau et d’assainissement et de l’Office de la biodiversité (OFB) indiquait que plus de 937 millions de mètres cubes d’eau avait été perdus sur l’année 2020 en raison des fuites, soit « l’équivalent de la consommation annuelle d’environ 18 millions d’habitants ».

À court terme, le gouvernement va ainsi lancer un « Ecowatt de l’eau » « pour que chaque Français, chaque agriculteur, chaque maire, chaque chef d’entreprise puisse connaître les gestes adaptés de manière très transparente et l’évolution de la situation » de l’eau, a précisé le chef de l’État. Ce dispositif est calqué sur l’Ecowatt de l’électricité. Un outil disponible gratuitement sur internet qui permet de savoir s’il y a des tensions sur le réseau et propose aux Français de recevoir une alerte en cas de risque élevé afin d’éviter les coupures en adoptant des écogestes simples, comme lancer son lave-linge à 22 heures plutôt qu’à 19 heures. Autre sujet majeur, la réutilisation des eaux usées. « Seul 1 % des eaux usées sont réutilisées en France. En Italie, c’est 10 fois plus, en Espagne, 20 fois plus et en Israël 100 fois plus », liste-t-il. « Aujourd’hui, un particulier ne peut pas alimenter ses toilettes avec de l’eau de pluie, il faut de l’eau potable.L’objectif est de réaliser 10% d’économie d’eau dans tous les secteurs d’ici 2030.

Sylvain Doublet, responsable de la prospective au sein de Solagro, estime que le plan « eau » n’enclenche pas une véritable adaptation du secteur agricole au dérèglement climatique. Un  sujet épineux d’actualité,  les stockages artificiels d’eau pour les agriculteurs. La mobilisation à Sainte-Soline est motivée par la mise en place de mégabassines, de vastes excavations qui peuvent contenir jusqu’à 650 000 mètres cubes d’eau soit l’équivalent de 260 piscines olympiques, et seize retenues d’eau d’une capacité totale d’environ 6 millions de mètres cubes doivent être construites. Et c’est la poursuite d’un modèle agricole productiviste très gourmand en eau ( 58% de la ressource), privilégiant les gros céréaliers et les cultures de maïs, qui est l’objet de polémiques sachant que ce mode de production n’est pas forcement la solution d’une alimentation durable . D’autant que « En cas d’arrêté préfectoral d’alerte sécheresse », seuls les exploitants raccordés aux bassines auraient le droit de continuer à irriguer et pas les autres.« La règle, c’est bien le partage de la ressource »parait-il?

L’association Générations futures, relève et  s’interroge : « Où sont les mesures sur la pollution ? ». Les dernières révélations sur les polluants éternels dits PFAS n’ont en effet pas été mentionné. Affaire à suivre.