Tous les articles par Jacqueline Collard

7 sur 8 des limites planétaires sont franchies

Selon une nouvelle étude de Nature, la Terre a dépassé sept des huit limites de sécurité scientifiquement établies et est entrée dans la « zone de danger », non seulement pour une planète en surchauffe qui perd ses zones naturelles, mais aussi pour le bien-être des personnes qui y vivent.« Nous nous trouvons dans une zone dangereuse pour la plupart des limites du système terrestre« , a déclaré Kristie Ebi, coauteur de l’étude et professeur de climat et de santé publique à l’université de Washington. « Pour toutes les limites définies dans cet article, limites qui prennent désormais en considération la question de la justice entre les humains et les différentes espèces, on va vers le pire. Qu’il s’agisse du climat, de l’eau, des cycles biochimiques et géochimiques de l’azote et du phosphore, associés aux engrais, de la biodiversité…»

 Environ deux tiers de la Terre ne répondent plus aux critères de salubrité de l’eau douce, ont indiqué les scientifiques à titre d’exemple.La grande différence dans cette  nouvelle étude est que les scientifiques se sont également penchés sur les niveaux local et régional et qu’ils ont ajouté l’élément de justice.

La planète peut se rétablir si elle change, notamment son utilisation du charbon, du pétrole et du gaz naturel et la façon dont elle traite la terre et l’eau, ont déclaré les scientifiques. Mais « nous allons dans la mauvaise direction sur pratiquement tous ces points« , a déclaré l’auteur principal de l’étude, Johan Rockstrom, directeur de l’Institut de Potsdam pour la recherche sur l’impact du climat, en Allemagne.

Cette nouvelle présentation de ces travaux apporte les bases méthodologiques et scientifiques pour définir les nouveaux objectifs d’une action de développement durable incitant à dépasser l’approche strictement climatique pour aller plus loin : relier « le climat à la nature, à l’eau douce, l’air pur et d’autres biens communs mondiaux et définir ce qui est nécessaire pour assurer notre avenir collectif », résume Gim Huay, le directeur général du Centre pour la nature et le climat au Forum économique mondial.

L’article de Nature: https://www.nature.com/articles/s41586-023-06083-8

L’urgence climatique n’est toujours pas une priorité

Même si plus d’un cinquième de l’humanité est concernée, cette urgence n’est pas vraiment pris en compte dans les politiques publiques et cela pas plus en France que dans les autres pays.

Déjà en 2002 soit il y a plus de 20 ans au Sommet de la Terre à Rio, notre président d’alors  Jacques Chirac avait prononcé ces mots qui sont restés célèbres mais malheureusement encore d’actualité: « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs »

Notre première ministre ,  s’exprimait dernièrement devant le Conseil national de la transition écologique (CNTE), un organe consultatif rassemblant les acteurs de la société civile, a annoncé un plan d’action visant à accélérer la réduction des émissions de GES d’ici à 2030, en précisant sa vision de la « répartition » ! N’allons pas trop vite nous avons le temps: ce qui n’est pourtant pas le cas .

Et ce n’est pas le manque de faits marquants qui devraient apporter une précipitation des mesures: des accidents climatiques chez nous comme ailleurs, incendies de plus en plus nombreux et se déclarant de plus en plus tôt dans l’année, pénurie criante d’eau potable dans certaines régions, brutalité de certaines précipitations qui provoquent çà et là des inondations inattendues et catastrophiques, montée attendue du niveau des mers et des océans, recul du trait de côte, etc.

Si les alertes du GIEC sont prises au sérieux par la plupart des citoyens, en France comme en Europe, notamment parce qu’ils voient en témoins directs les évolutions climatiques dans les zones tempérées, on s’aperçoit que la prise de conscience n’est pas unanime, et pourtant de plus en plus personne ne sont  réellement dupes des intérêts financiers et des profits que certains engrangent au détriment de l’intérêt collectif. Nous pensons bien que des actions sont envisageables et pourraient être prises dans de nombreux états pour imposer des politiques fortes en matière de pollution.

Le round parisien du traité sur les plastiques s’est achevé sans grande avancée

La question de la toxicité des plastiques et des additifs, soulevée par la société civile et les scientifiques, est aussi évoquée, mais de nombreux pays et les industriels, observateurs influents du processus, craignent que le futur traité ne bloque l’innovation.
Le principe d’un traité juridiquement contraignant a été arrêté en février 2022 à Nairobi, au siège du Programme des Nations unies pour l’Environnement (PNUE).

La contamination des PFAS examinée à l’Assemblée Nationale

Mercredi 31 mai, la commission du développement durable de l’Assemblée nationale française examinait une proposition de loi visant à limiter la contamination aux PFAS.

Rappel : Les PFAS concernent plusieurs produits contenant des per- et polyfluoroalkylés (PFAS), des substances toxiques prisés par les industriels pour leurs propriétés antiadhésives, antitaches et imperméabilisantes et fréquemment utilisés néanmoins . Le premier signal d’alerte a été émis en 1961, lorsqu’un toxicologue travaillant pour DuPont aux Etats Unis a découvert que le téflon ( un revêtement pour casseroles développé par l’entreprise et intégrant  des PFAS )  augmentait la taille du foie des rats qui y étaient exposés à faible dose. Depuis les entreprises savaient pourtant dès les années 1970 que ces polluants éternels étaient très dangereux.

Le programme de biosurveillance Esteban a montré, en 2020, que ces molécules  étaient détectables dans le sang de toute la population française, enfants compris. Des scientifiques en ont même trouvés jusque dans les tissus des ours polaires du Groenland.

Le film Dark Waters  a été tirée de faits réels grâce aux archives des procédures judiciaires fort nombreuses qui se sont déroulés aux Etats Unis,  son réalisateur est Todd Haynes, le film est sorti en 2019. , l’histoire a déjà fait l’objet d’une enquête-fleuve publiée en janvier 2016 par le New York Times Magazine. Elle met en scène un avocat aux prises avec un géant de la chimie, accusé par une petite communauté de Virginie-Occidentale d’avoir contaminé leur environnement avec des substances dangereuses. Le film est sorti en France le 26 février 2023.

Un traité plastiques en vue ? Les négociations sont en cours à Paris

En mars 2022, l’ONU Environnement avait décidé d’élaborer d’ici 2024 un traité multilatéral qui doit être « juridiquement contraignant » pour faire face à la crise mondiale des plastiques. Des chercheurs s’intéressant à la pollution plastique estiment en effet, dans une étude publiée dans la revue Science, qu’en suivant la trajectoire actuelle, le déversement des déchets plastiques dans les océans devrait atteindre 29 millions de tonnes en 2040, soit trois plus qu’aujourd’hui. Au contraire, si une transformation complète de notre utilisation du plastique est entamée, la pollution pourrait réduire de 80 % en deux décennies. Les estimations théoriques donnent le chiffre de 8 millions de tonnes de plastiques par an rejetées à la mer à l’échelle mondiale, à l’échelle du bassin de la Seine, ce serait déjà entre 2 000 et 6 000 tonnes, toutes tailles confondues.

La première session de la « Coalition de haute ambition pour mettre fin à la pollution plastique », conduite par le Rwanda et la Norvège avait eu lieu  en fin d’année 2022  en Uruguay – il doit y en avoir cinq au total:  cette dernière a servi à dresser une synthèse de l’état des connaissances, il s’agit cette fois d’entrer dans le vif du sujet. C’est donc  Paris qui accueille à partir du lundi 29 mai et jusqu’au 2 juin la deuxième session de négociations pour un Traité international sur les pollutions plastiques avec la participation de 175 états dont le Japon qui a rejoint ce 2ème round. Deux blocs s’opposent, l’un très ambitieux, soutenu par les scientifiques et les ONG, l’autre beaucoup moins allant, soutenu notamment par le lobby pétro-chimique. Sur le fond, il s’agit de savoir si le traité ne s’attaque qu’aux déchets ou aussi à la production plastique, et donc aux énergies fossiles.

Car c’est bien là le cœur du sujet. 99 % des plastiques sont aujourd’hui fabriqués à partir de combustibles fossiles. Et les prévisions estiment que les plastiques et les produits pétrochimiques seront à l’origine de 30 % de la croissance de la demande de pétrole d’ici 2030, et de près de la moitié de la croissance de la demande de pétrole d’ici 2050. Le 22 mai, plus de 150 groupes de la société civile et des scientifiques du monde entier ont signé une lettre ouverte exhortant l’ONU à agir maintenant pour empêcher l’industrie des combustibles fossiles de saper les négociations.