Tous les articles par Jacqueline Collard

La myopie, une pathologie qui s’accroît chez les plus jeunes

Dés  2012, la revue The Lancet avait publié une étude chinoise qui annonçait déjà près de 90% la proportion de jeunes souffrant de ce trouble de la vision à la fin du lycée.

 Une nouvelle étude chinoise datant de cet été  a été publié dans  la revue The Lancet pour  le JAMA Ophtalmology, à partir de tests de vue réalisés entre 2015 et 2020 sur plus de 120 000 enfants âgés de 6 à 13 ans. Les résultats sont sans appel chez les enfants âgés de 6 à 8 ans : en 2020, ils ont en moyenne « perdu » 0,3 dioptries, l’unité de mesure de l’acuité visuelle. « La prévalence de la myopie a été multipliée par 1,4 à 3 en 2020 par rapport aux cinq années précédentes », commentent les chercheurs. Dans le détail, la proportion d’enfants de 6 ans atteints de myopie a dépassé les 21% en 2020 (5,7% entre 2015 et 2019) ; 26% pour les enfants de 7 ans (contre 16,2%) et 37% pour ceux de 8 ans (contre 27%).

Le chercheurs qui ont procédé à cette étude expliquent leurs résultats par la  plus grande sensibilité des plus jeunes aux changements environnementaux, sans oublier  le temps passé devant un écran avec l’école à la maison.  Ils estiment nécessaires des études supplémentaires et le suivi à long terme de ces enfants, « dans une période critique pour le développement de la myopie ». D’autres chercheurs qui ont publié dans le JAMA Ophtalmology jugent eux qu’en cas de nouveaux confinements, il serait judicieux de ne pas restreindre les jeux extérieurs des jeunes enfants, pour aider à contrer une vague de « myopie de quarantaine ».

Comprendre les effets chlordécone aux Antilles

Interdit dès les années 1970 aux États-Unis et en 1990 en métropole, le chlordécone a été massivement utilisé en Guadeloupe et en Martinique de 1972 à 1993 afin de protéger les bananeraies contre l’attaque d’un insecte, le charançon noir. Selon une étude de Santé publique France publiée en 2018, sa molécule se retrouve dans le sang de 95 % des Guadeloupéens.

Dés 1963, une étude de l’Université de l’Ohio a montré la toxicité de chlordécone chez la souris et chez la poule. En France, en 1968 et en 1969, l’utilisation du chlordécone est rejetée par la Commission des Toxiques qui dépend du ministère de l’Agriculture.
Mais, en 1972 c’est un bouleversement quand le ministre de l’agriculture de l’époque, Michel Cointat, autorise finalement l’utilisation du chlordécone en France.
Plus tard, en 1975, aux Etats-Unis, des ouvriers d’une usine de production de chlordécone sont victimes de sérieux troubles testiculaires et neurologiques.

Les autorités américaines prennent alors une décision radicale : interdire l’insecticide dans tout le pays à partir de 1976.

En France la substance a donc été massivement utilisée entre 1972 et 1993 ! Pourtant, depuis 1979, cette substance avait été classée « possiblement cancérigène ».

L ’étude « ChlEauterre » : qui a été publiée en septembre 2017 a permis d’identifier les territoires susceptibles de contenir le plus de « chlordécone ». [2] Les spécialistes estiment que les sols sont pollués pour au moins 600 ans, soit plus qu’un quart de la surface agricole des îles a été directement contaminé par le chlordécone. Ce sont les terres, mais aussi les nappes phréatiques, les rivières et même l’océan qui sont actuellement contaminés ! La catastrophe est telle qu’il est interdit de pêcher certains poissons dans l’océan Atlantique à moins de 500 m des côtes

Sur le plan sanitaire : la Martinique est le lieu avec le plus haut taux de cancer de la prostate au monde : 227 cas pour 100 000 hommes. En Guadeloupe le taux de cancer de la prostate est également élevé avec 184 cas pour 100 000 hommes.

Or en ce début d’année,  une bande dessinée illustre ce désastre sanitaire :

Le scandale du chlordécone dans les Antilles françaises par Jessica Oublié, Kathrine Avraam, Vinciane Lebrun et Nicola Gobbi

Jessica Oublié, installée en Guadeloupe depuis février 2018, y découvre avec stupéfaction les dommages du chlordécone sur l’environnement, l’eau, les aliments et les populations. Elle y consacre dix-mois de recherche et d’écriture qui la font voyager entre la Guadeloupe, la Martinique, l’Hexagone, les États-Unis et la Belgique et qui aboutissent à la publication de Tropiques toxiques, son deuxième roman graphique documentaire. Kathrine Avraam est autrice de bande dessinée et Illustratrice d’origine grecque. Elle est installée en France depuis 2015. Nicola Gobbi est auteur de bande dessinée et illustrateur. Il a illustré plusieurs albums en Italie. Vinciane Lebrun est photographe documentaire et fondatrice de l’agence Voyez-Vous.
Ce documentaire illustré permet de suivre les aventures de cette molécule chimique là où elle a été utilisée.

 

One planet Summit à Paris : objectif Biodiversité

Alors que le  projet de loi issue de la Convention citoyenne pour le climat (CCC) est « finalisé » et devrait arriver en discussion à l’Assemblée nationale fin mars, la France accueille ce sommet mi-virtuel quatrième édition du «One Planet Summit» (OPS), organisé en concertation avec les Nations unies et la Banque mondiale.

Une trentaine de décideurs mondiaux doivent à cette occasion présenter, des initiatives ou prendre des engagements concrets. Le président français en a profité pour permettre la publication de la stratégie nationale des aires protégées. A cette occasion a été dévoilée la feuille de route de la France , qui vise à enrayer la perte de biodiversité d’ici à 2030, ce qui constitue la première stratégie globale intégrant à la fois la métropole et les outre-mer ainsi que les enjeux terrestres et maritimes. Elle se décline en sept grands objectifs et dix-huit mesures visant non seulement à développer le réseau d’aires protégées – qui couvre aujourd’hui 29,5 % des terres et 23,5 % des mers –, mais aussi à renforcer cette cohérence.

C’est d’autant plus indispensable que simultanément un rapport du WWF fait le constat que dans le monde, 43 millions d’hectares de forêts perdus entre 2004 et 2017l’ont été ,ce qui représente l’équivalent de 80 % de la superficie de la France métropolitaine, nous voyons bien là encore l’urgence de la situation.

L’objectif de ce sommet est d’impulser un élan politique mondial pour que 2021 soit bien la « super année de la biodiversité » que 2020 n’a pas pu être.

« Ce rendez-vous est important en termes de mobilisation politique avant le congrès mondial de l’Union internationale pour la conservation de la nature [prévu en septembre à Marseille] et la COP15*, qui doit se tenir en Chine explique Sébastien Moncorps, le directeur du comité français de l’UICN. Pour obtenir un accord ambitieux fin 2021, il faut créer des coalitions d’acteurs pour entraîner les pays dans une dynamique positive. ». Parmi ces promoteurs, la Coalition de la haute ambition pour la nature, qui œuvre à faire adopter lors de la COP l’objectif de protéger 1/3 de la planète avant 2030 : une bonne finalité que nous nous ferons un devoir de suivre comment.

*COP 15 : 15e Conférence des parties (COP) de la Convention de l’ONU sur la diversité biologique qui se tiendra en Chine à la fin 2021.

Plate-forme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES)

https://www.wwf.fr/champs-daction/foret/approvisionnement-responsable/deforestation

Réinventer la santé en commun

Un livre emblématique en cette période  troublée, qui peut envisager des modes de gouvernance originales:

Dans « Pandémopolitique », Jean-Paul Gaudillière, Caroline Izambert et Pierre-André Juven expliquent comment la pandémie ouvre une brèche politique pour penser un autre triage, réinventer notre santé selon d’autres priorités : sociales, écologiques, démocratiques.

L’essentiel n’est donc pas tant de savoir si nous trions ou pas que de choisir collectivement les modalités du triage et de définir démocratiquement les priorités de notre système de santé. Des expériences alternatives se rappellent à nous et dessinent des horizons différents, du renouveau de la santé communautaire aux potentialités des communs, en passant par l’émergence d’un triage écologique.La crise du Sars-CoV-2 est en cela bien plus qu’une crise sanitaire. Elle est un événement pandémopolitique affirment ces auteurs.

Auteurs: Jean-Paul Gaudillière, historien des sciences, est directeur de recherche à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM). Caroline Izambert est docteure de l’EHESS et travaille pour l’association de lutte contre le sida et les hépatites AIDES. Pierre-André Juven est sociologue, chargé de recherche au CNRS et membre du Cermes3.

« Pandémopolitique   éditions La Découverte, janvier 2021

Quelles sciences pour le monde à venir ?

Un livre à l’initiative du Conseil scientifique de la fondation Hulot (sous la direction d’Alain Grandjean et Thierry Libaert. Avec la participation de Loïc Blondiaux, Nicolas Bouleau, Dominique Bourg, Philippe Cury, Marc Dufumier, Marie Duru-Bellat, Jean-Baptiste Fressoz, François Gemenne, Gaël Giraud, Pierre-Henri Gouyon, Jean Jouzel, Marc Lachièze-Rey … )

Quelles sciences pour le monde à venir ? : Fondation Nicolas Hulot (Auteur) Face au dérèglement climatique et à la destruction de la biodiversité

L’époque est riche en événements et situations où l’expertise scientifique est sommée de se prononcer. Quittant les laboratoires pour descendre dans la rue, elle doit affronter les lobbies industriels, les médias, et composer avec des stratégies politiques et économiques qui lui sont étrangères. La « vérité » scientifique, toujours temporaire et fragile, sort souvent malmenée de ce combat inégal. Comment faire en sorte que la science devienne la meilleure alliée de la démocratie ? C’est un vaste chantier auquel s’est attelé depuis vingt ans le Conseil scientifique de la Fondation Nicolas Hulot.

À partir d’exemples concrets, dont au premier chef la question du climat, il a patiemment démêlé l’écheveau d’intérêts particuliers et de modes de pensée obsolètes qui mènent à s’opposer systématiquement aux avancées de la science et à maintenir un commode statu quo (business as usual et « après moi le déluge »), même lorsque l’avenir de la planète est en jeu. Ces analyses éclairantes montrent la voie d’une meilleure dissémination de la pensée scientifique permettant à tout citoyen de décider en toute indépendance de son avenir.

Ces mesures pour une saine prise en compte de la science dans le débat et l’action politiques se résument en un « pacte scientifique » en cinq points, quinze ans après le « pacte écologique » proposé par la même Fondation.