Tous les articles par Jacqueline Collard

« Coût social des drogues en France »

L’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) a estimé dans un rapport « le coût des drogues (alcool, tabac, et drogues illicites) pour les finances publiques françaises » à 1,1% du PIB, soit « 33% du déficit budgétaire français ». Ce coût représente la différence ente les dépenses (prévention, répression, mais surtout coût des soins), et les recettes (taxation des drogues licites et économie des retraites non versées). À titre indicatif, la taxation sur les alcools ne représente que 37 % du coût des soins des maladies engendrées par l’alcool tandis que les taxes sur le tabac représentent 40% de ceux liés aux maladies qu’il engendre.

Par ailleurs, les drogues ont également un « coût social », principalement représenté par le « coût externe » selon ce rapport, c’est-à-dire le cumul des coûts frappant les consommateurs (valeur des vies humaines perdues, perte de qualité de vie), et de ceux frappant les acteurs extérieurs au marché des drogues (pertes de production des entreprises et des administrations). De ce point de vue, alcool et tabac représentent chacun un fardeau de 120 milliards d’euros annuels, bien supérieurs aux 8,7 milliards dépensés dans le cadre des drogues illicites. Ces chiffres sont à mettre en relation avec le nombre de personnes touchées car si les « usagers à risques d’alcool » ne sont «que » 3,8 millions, contre les 13,4 millions de fumeurs dénombrés dans l’hexagone, la somme annuellement dépensée par l’État pour chacun de ces deux fléaux est équivalente. Cela s’explique notamment par le nombre d’années de vie perdues: l’âge moyen au décès pour l’alcool est de 63 ans, contre 71 ans pour le tabac.

Plus d’informations sur :  Le coût social des drogues en France OFDT – Pierre Kopp

Décision historique : la responsabilité de Monsanto confirmée par le tribunal de Lyon

Le géant de l’agrochimie Monsanto est reconnu responsable de l’intoxication de Paul François. L’agriculteur charentais souffre depuis plus de dix ans de graves troubles physiques, à cause d’un herbicide très nocif : le Lasso. Oui, le pesticide est bien à l’origine de sa longue maladie. Oui, Monsanto connaissait la dangerosité du Lasso et n’a pourtant rien fait. Oui, le géant étasunien est responsable de son calvaire.

Sa vie de céréalier  bascule le 27 avril 2004. Alors qu’il vérifie une cuve ayant contenu du Lasso, un herbicide qu’il pulvérise régulièrement sur ses champs de maïs, il inhale des vapeurs toxiques. S’ensuivent malaises, maux de tête violents, absences. Hospitalisé pendant cinq mois, il va de coma en coma, sans comprendre ce qui lui arrive. Il faudra attendre un an et l’intervention du Professeur André Picot pour connaître le coupable : le monochlorobenzène, un solvant hyper nocif entrant à 50 % dans la composition du Lasso.
Là commence un long combat. Contre la Mutuelle sociale agricole d’abord, pour faire reconnaître son intoxication comme maladie professionnelle. Puis contre Monsanto. Car pour Paul François, la firme connaissait les dangers de son produit. La preuve : le Lasso n’est plus vendu au Canada depuis 1985… bien avant son interdiction en France, en novembre 2007.

Le bras de fer judiciaire s’engage, et va se révéler ardu. « C’était du harcèlement quotidien, le côté humain n’existe pas dans leur stratégie », observe, amer, l’agriculteur. La firme va jusqu’à remettre en question sa maladie. Mais Paul François ne se laisse pas intimider. Entouré de scientifiques bénévoles qui soutiennent sa cause, appuyé par l’association Phyto-victimes qu’il a co-fondée, il obtient une première victoire en 2012. Le tribunal de grande instance de Lyon reconnaît Monsanto « responsable » de son intoxication. La firme fait appel… mais son pourvoi vient donc d’être rejeté ce 10 septembre.

Cette première juridique peut avoir des conséquences importantes pour avancer vers une agriculture plus respectueuse de l’environnement. Notamment en France, un pays qui reste le troisième plus gros utilisateur mondial de produits phyto-sanitaires et le premier en Europe ! Et cela malgré les engagements pris lors du Grenelle de l’environnement en 2007 de diminuer leur usage de moitié. D’ailleurs, son avocat, François Lafforgue, a appelé à la création d’un fonds pour indemniser les autres victimes des pesticides.

La poussière des fermes protégerait contre l’asthme

Des chercheurs belges ont mis en évidence le rôle protecteur de la poussière des fermes vis-à-vis de l’asthme, dans une étude publiée dans Science. Pour Bart Lambrecht, professeur de médecine pulmonaire à l’université de Gand en Belgique, l’explication résiderait dans le fait que « La poussière (présente dans les fermes) rend la muqueuse des voies respiratoires moins réactive aux allergènes comme les acariens. À ce stade, nous avons mis en évidence un lien entre la poussière dans les fermes et la protection contre l’asthme et les allergies ».

L’étude s’est déroulée en deux temps : une phase toxicologique suivie d’une phase épidémiologique suivie. La première étape a consisté à exposer des souris à cette fameuse poussière, recueillies dans des fermes suisses et belges. C’est ainsi qu’ils ont pu découvrir que les souris exposées étaient protégées aux allergies aux acariens et à l’asthme. La raison résiderait dans la production d’une protéine protectrice au contact de cette poussière, la protéine A20. L’étude épidémiologique a permis de confirmer sur un groupe de 2000 sujets ayant grandi à la ferme que la prévalence (le nombre de cas déjà déclenchés) de l’asthme était inférieure à celle de la population générale. Parmi ceux qui souffraient malgré tout d’asthme ou d’allergie aux acariens, les chercheurs ont mis en évidence une carence en protéine A20 liée à « une variation génétique du gène A20 qui entraîne une défaillance de la protéine A20 ».

Cette découverte permet d’espérer la découverte d’un traitement préventif contre l’asthme, mais cela prendra probablement encore plusieurs années.

Plus d’informations sur :  www.sciencemag.org/

Les propriétés du vinaigre blanc reconnues par l’Europe

La Commission Européenne a reconnu cet été le pouvoir bactéricide et fongicide du vinaigre blanc, autorisant de fait la mairie de Paris qui en avait fait la demande à désinfecter ses outils de jardinage avec. Le règlement européen n°2015/1108 permet désormais également à toute collectivité ou entreprise qui souhaiterait utiliser le vinaigre blanc à cet usage de le faire en toute conformité. En effet, l’homologation européenne en était un préalable nécessaire.

Le vinaigre blanc est une alternative intéressante aux pesticides conventionnellement utilisés et qui sont nuisibles tant pour l’environnement que pour la santé des travailleurs. Toutefois seule la désinfection des outils de jardinage a fait l’objet de l’homologation: il faudrait faire une nouvelle demande pour s’en servir comme désherbant par exemple.

Vers une explication des « effets cocktails »

Nature Communications vient de publier une étude in vivo de chercheurs de l’INSERM et du CNRS, élucidant le mécanisme d’un « effet cocktail », celui d’activation d’un processus de détoxification de l’organisme (récepteur des xénobiotiques PXR) en présence d’un pesticide organochloré (trans-nonachlor) et d’un principe actif des pilules contraceptives (éthinylestradiol).

Le principe des effets cocktails réside dans le fait que deux molécules, prises isolément dans des quantités données, peuvent être inactives sur l’organisme alors qu’elles auront un effet qi elles sont prises simultanément, et ce, pour les mêmes quantités. Ce phénomène est connu de longue date en sciences naturelles, particulièrement dans le cas des perturbateurs endocriniens, sans que les mécanismes en jeux n’aient été identifiés clairement. Il pose un problème dans les études précédant l’autorisation de commercialisation des molécules chimiques puisque, à défaut de connaître le mécanisme, il n’est à ce jour pas pris en compte et chaque molécule était étudiée isolément.

L’expérience menée par les chercheurs montre que les deux molécules associées forment un complexe dont l’affinité pour le récepteur testé est très supérieure à celle de chaque molécule prise isolément. Pour suivre le cours normal de la recherche, l’expérience doit à présent être validée in vivo, c’est à dire non plus sur des cellules en culture mais sur des animaux de laboratoire. C’est seulement après confirmation de l’hypothèse suite à cette étape que l’on pourra attendre des retombées effectives dans le domaine de l’évaluation des risques liés à l’utilisation des produits chimiques.

William Bourguet, chercheur du Centre de biochimie structurale de l’université de Montpellier (CNRS/Inserm) et co-auteur de cette étude rappelle par ailleurs que « le travail est colossal puisqu’il existe dans notre environnement quelque 150.000 composés dont l’action combinée pourrait avoir des effets inattendus sur la santé humaine au regard de leur innocuité reconnue ou supposée en tant que substances isolées. »

Plus d’informations sur :

http://www.nature.com/ncomms/2015/150903/ncomms9089/full/ncomms9089.html

http://presse-inserm.fr/les-dessous-de-leffet-cocktail-des-perturbateurs-endocriniens-reveles/20453/