Tous les articles par Jacqueline Collard

11 Mars : 9 ans après Fukushima, où en est on ?

Le 11 mars 2011, un accident nucléaire majeur débutait à la centrale nucléaire de Fukushima Daichi. 9 ans après, contrairement à ce que prétendent les autorités, la situation n’est toujours pas sous contrôle. Neuf ans plus tard, les autorités veulent croire en une résurrection rapide de la région en l’intégrant dans les jeux olympiques de Tokyo d’août prochain, mais est- ce bien raisonnable?

1,2 millions de tonnes d’eau contaminée, que TEPCO souhaite rejeter dans l’Océan Pacifique, sont entreposées sur le site. Les trois cœurs de réacteur ayant fondus se situent toujours sous la centrale accidentée. Par ailleurs, des opérations périlleuses de retrait des combustibles usés situés dans les piscines de refroidissement doivent toujours être menées et de nouveaux rejets ne sont pas exclus.

Dans les villes et villages de la région de Fukushima, jonchés de millions de sacs de terre contaminée dont on ne sait que faire, la « décontamination » s’avère illusoire. De nombreux points contaminés sont régulièrement découverts.Plutôt que de protéger les populations, les autorités pratiquent le déni à grande échelle, relevant les seuils acceptables d’exposition à la radioactivité et incitant les personnes évacuées à revenir vivre dans les zones contaminées. Le Premier ministre Shinzo Abe et l’industrie nucléaire comptent utiliser les Jeux Olympiques de Tokyo comme vitrine pour laisser croire que l’accident appartient au passé.

La radioactivité du césium 137 qui s’est déposé sur de très vastes surfaces lors de l’accident , bien au-delà de la préfecture de Fukushima, y compris jusqu’à Tokyo, n’a diminué que de 20 % en 9 ans… Les puissants rayonnements gamma qu’il émet en permanence continuent à irradier ceux qui travaillent ou qui se réinstallent sur les secteurs partiellement décontaminés de la préfecture de Fukushima et des autres préfectures impactées. Les séquelles de la catastrophe sont pourtant loin d’être nettoyées et il faudra encore des décennies pour régler le problème des 880 tonnes de matières nucléaires hautement radioactives qui ont fondu lors de la catastrophe.

Notre partenaire la Criirad parle d’impossible décontamination

Communiqué partiel Criirad: « Sur la base des constats effectués lors de plusieurs missions au Japon depuis 2011, notre film «Invisibles Retombées» et son teaser mis en ligne aujourd’hui sur notre chaîne Youtube, rend compte de la puissance des radiations invisibles et démontre l’impossibilité d’effectuer une décontamination complète. Dans les zones contaminées par les retombées, la vie ne sera plus «normale» durant des dizaines, voire des centaines d’années; le danger sera là, présent en permanence dans chaque sous-bois, sous chaque pierre, dans chaque ruisseau.. »

En complément lire le communiqué de presse en version longue : Fukushima : le mythe du retour à la normale

Lire le communiqué sur le site de la CRIIRAD : www.criirad.org

« Biodiversité : le pari de l’espoir » d’Hervé Le Guyader: un livre qui aide à comprendre

Dans « Biodiversité : le pari de l’espoir », Hervé Le Guyader veut aller au-delà du catastrophisme. Un livre qui aide à comprendre pour ne pas baisser les bras.

  • Présentation du livre par son éditeur :

« Sixième extinction », destruction du « tissu vivant de notre planète », de la « cathédrale du vivant »… Pour invoquer l’effondrement de la biodiversité, les mots sont forts. Pourtant, ils n’incitent manifestement pas à agir. En dépit des rapports toujours plus alarmants, la prise de conscience collective tarde à venir.

Et si nous n’agissions pas faute de comprendre ce qui est en jeu ? C’est du moins l’hypothèse d’Hervé Le Guyader, qui se méfie du fatalisme trop souvent associé au mot « biodiversité » pour lui privilégier une approche plus fine – croisant la biologie, l’étymologie, l’anthropologie, la neurophysiologie… –, beaucoup plus porteuse d’espoir.

En débordant pour la première fois du seul cadre scientifique, il rend compte non seulement de la biodiversité, mais aussi de la dynamique propre à l’espèce humaine dans cette même biodiversité. Car aux origines de la crise actuelle, il identifie un problème majeur, ô combien d’actualité : l’écart qui s’est creusé entre notre pensée et le reste du vivant.

Hervé Le Guyader est l’un des grands noms de la biologie actuelle, il est professeur honoraire de biologie évolutive à l’université Paris-6 — Pierre et Marie Curie, mais également directeur de l’UMR Systématique, adaptation, évolution du CNRS. Naturaliste de terrain, il a, comme codirecteur, participé à l’expédition Santo, ambitieuse mission scientifique qui a été menée en 2006 à propos de la biodiversité de l’île d’Espiritu Santo dans la République du Vanuatu.

La baisse des objectifs de réduction des consommations d’énergie est inquiétante

Nous rapportons ici le communiqué de presse de notre partenaire Négawatt

À l’issue du décryptage de la politique gouvernementale qu’elle vient de réaliser, l’Association négaWatt sonne l’alerte: si l’on veut répondre aux enjeux environnementaux, économiques et sociaux de l’urgence écologique, la maîtrise des consommations doit rester la priorité de l’action.

Le processus de révision de la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) et de la Stratégie nationale bas carbone (SNBC) lancé en 2018 devait être l’occasion pour le gouvernement de se doter d’une feuille de route à court et moyen termes à la hauteur des objectifs que la France s’est fixés. Il se clôture à l’inverse sur des projets de textes prévoyant une révision à la baisse des objectifs intermédiaires en matière de réduction des consommations d’énergie par rapport à la précédente PPE, de plans d’actions flous et d’une augmentation des budgets carbone sur la période 2019-2023. Une stratégie de procrastination inquiétante, qui risque d’imposer la mise en place de mesures plus fortes et plus radicales par la suite.

Alors que Haut Conseil pour le Climat martèle à nouveau que la France « n’est pas du tout sur la bonne trajectoire » pour atteindre la neutralité carbone en 2050, le constat sur la politique actuelle du gouvernement en matière d’énergie et de climat laisse perplexe. Derrière une volonté affichée de faire de l’écologie une priorité, le gouvernement d’Édouard Philippe semble se réfugier dans une électrification forcenée au détriment de la performance énergétique et de la nécessaire réduction des consommations. La France est-elle en passe de faire marche arrière face à l’urgence écologique ?

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L’inaction climatique n’est plus acceptable

Le 4 mars  la revue Nature analyse dix ans de rapports du Programme des Nations Unies pour l’environnement sur les besoins en matière de réduction des émissions. Le constat est sans appel : les auteurs concluent que la lenteur des progrès en matière d’action climatique a mené à une « décennie perdue » et que les efforts déployés aujourd’hui pour atteindre les objectifs de Paris doivent quadrupler pour éviter les scénarios désastreux décrits dans le rapport 1.5 du GIEC.

« L’Europe a connu l’hiver le plus doux jamais enregistré. Bien qu’il s’agisse d’un événement véritablement extrême en soi, il est probable que ce genre d’événement ait été rendu plus extrême par la tendance au réchauffement climatique », a déclaré Carlo Buontempo, directeur du Service Copernicus pour le changement climatique (C3S)*

Nous rappelons à cette occasion la  proposition de loi européenne sur le climat présenté au Parlement européen par sa nouvelle présidente Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne,dans le cadre de son initiative de « Green Deal » européen.

Nous relayons les commentaires d’ ONG environnementales européennes qui  ont relevé à la fois des avancées mais également des lacunes dans la proposition de loi sur le climat publiée dans ce cadre.

Parmi les éléments positifs inclus dans la proposition de la CE :
- La CE envoie un signal d’ambition au reste du monde en inscrivant dans la loi un objectif de neutralité carbone (« net zero ») d’ici 2050 ;
- La CE montre sa volonté de se doter d’un système de gouvernance adéquat pour garantir la réalisation de ses objectifs climatiques.
- La loi définit un processus permettant d’établir une trajectoire vers l’objectif de neutralité climatique et de vérifier et corriger régulièrement les progrès réalisés dans ce sens.

Cependant, la proposition de la Commission échoue sur des points clés :
- La CE ne prévoit pas la création d’un organisme scientifique indépendant.
- La proposition ne contient pas de disposition prévoyant de réexaminer tous les cinq ans la stratégie à long terme de l’UE en matière de climat et d’énergie.
- La proposition ne suggère pas les 50-55 % de réduction des émissions comme nouvel objectif européen pour 2030. L’augmentation de cet objectif (actuellement fixé à -40%) est pourtant une demande essentielle du Parlement européen, des entreprises et des acteurs de la société civile.
- La CE ne parvient pas à garantir que les citoyens puissent directement demander des comptes à l’UE.

Il est annoncé une première discussion sur la proposition de loi européenne sur le climat par les ministres de l’Environnement de l’UE  prévue le 22 avril. Pascal Canfin, le président de la commission Environnement du Parlement européen, a déclaré qu’il souhaitait que sa commission vote sur la proposition en juin/juillet de cette année, avant que la proposition ne soit soumise à la plénière du Parlement en septembre.

  • Source : European climate foundation

Le Service Copernicus pour le changement climatique (C3S), mis en œuvre par le Centre européen pour les prévisions météorologiques à moyen terme pour le compte de la Commission européenne, publie régulièrement des bulletins climatiques mensuels faisant état des changements observés dans la température de l’air à la surface du globe, la couverture de glace de mer et les variables hydrologiques.

Le coût exorbitant du démantèlement jugé par la Cour des comptes

Dans un rapport rédigé à la demande de la commission des finances du Sénat et publié  ce mercredi 4 mars, la Cour des comptes juge sévèrement le calendrier et les coûts envisagés par EDF, Orano (ex-Areva) et le CEA pour assurer la fin de ses centrales. Il évoque une insuffisance dans la mobilisation des pouvoirs publics sur le sujet. La cour des comptes demande également l’État d’anticiper sérieusement les fermetures de réacteurs à venir et à mieux planifier sa politique énergétique en la matière.

Les magistrats rappellent que la France a fait le choix du principe d’un démantèlement « immédiat », qui est inscrit dans la loi depuis 2015 et prévoit que les opérations doivent débuter « dans un délai aussi court que possible – dans des conditions économiquement acceptables ».

Ceux ci appellent aussi , dans leur rapport, à une grande prudence dans l’évaluation des coûts. La projection actuelle des charges de démantèlement s’élève à 46,4 milliards d’euros, avec un calendrier qui s’étale sur plus d’un siècle. « La prudence des évaluations actuelles mériterait d’être encore renforcée », euphémise la Cour des comptes. Autre motif d’inquiétude : l’échéancier des opérations. « Le provisionnement des charges futures ne repose pas toujours sur les calendriers les plus réalistes », soulignent les magistrats, d’autant que la proposition préalable à la loi a été produite en 2012 et n’a pas été réétudiée.