Réduire la pollution atmosphérique: une urgence de santé publique

Habiter à proximité du trafic routier augmente sensiblement la morbidité attribuable à la pollution atmosphérique. Diminuer encore les niveaux de particules fines dans l’air des villes européennes entraînerait un bénéfice non négligeable en termes d’ augmentation de l’espérance de vie et de réduction des coûts pour la santé. Ce sont les 2 principales conclusions du projet Aphekom mené par l’Institut de veille sanitaire (InVS) dans 12 pays européens et par plus de 60 scientifiques . C’est aussi un tout nouvel éclairage sur les effets sanitaires et économiques de la pollution urbaine en Europe.

Réduire la pollution permet des gains importants d’espérance de vie

Depuis la fin des années 1990, les études témoignant de l’impact de la pollution sur la santé et sur la mortalité s’accumulent. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, “trois millions de personnes meurent chaque année sous l’effet de la pollution atmosphérique, soit 5 % des 55 millions de décès annuels dans le monde. Vu la marge d’incertitude des estimations, le nombre réel des décès annuels pourrait se situer entre 1,4 et 6 millions”.
Plus récemment, ce sont les particules fines qui ont attiré l’attention des scientifiques, en raison de leur devenir dans l’organisme.

Dès 1997, le Comité de la prévention et la précaution, qui dépend du ministère de l’Aménagement du territoire et de l’Environnement, précisait que “ce sont les particules fines (diamètre inférieur à 2,5 µm) émises principalement par les moteurs diesel qui atteignent en plus grand nombre les alvéoles des poumons ; les particules de plus grande taille étant précipitées sur la muqueuse des voies aériennes, puis dégluties”. Au-delà de l’impact respiratoire (asthme, bronchite…), des conséquences cardiovasculaires et des décès sont directement liés à ces fines particules.
Et les résultats du projet européen Aphekom confirment ces données alarmistes. Les évaluations de l’impact sanitaire dans 25 grandes villes européennes montrent que l’espérance de vie pourrait augmenter de 22 mois supplémentaires pour les personnes âgées de 30 ans et plus (en fonction de la ville et du niveau moyen de pollution), si les niveaux moyens annuels de particules fines PM2,5 étaient ramenés au seuil de 10 microgrammes par mètre-cube, valeur guide préconisée par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS).

Le gain moyen en espérance de vie serait ainsi de 7,5 mois pour Marseille ; 5,8 mois pour Lille et Paris ; 5,7 mois pour Lyon et Strasbourg…
Le respect de la norme préconisée par l’OMS se traduirait par une économie d’environ 31,5 milliards d’euros (diminution des dépenses de santé, de l’absentéisme, et des coûts associés à la perte de bien-être, de qualité et d’espérance de vie).

Habiter à proximité du trafic routier augmente asthme, maladie cardio et respiratoire

Utilisant une modélisation inédite d’évaluation de l’impact de la pollution atmosphérique, le projet Aphekom démontre qu’habiter à proximité du trafic routier est un facteur majorant dans le développement de pathologies chroniques.
Il a été estimé notamment que, dans 10 villes européennes, le fait d’habiter à proximité du trafic routier pourrait être responsable d’environ 15 à 30 % des asthmes de l’enfant. On pourrait retrouver des proportions similaires ou plus élevées de pathologies chroniques respiratoires et cardiovasculaires fréquentes chez les adultes de 65 ans et plus habitant à proximité du trafic.
Là encore, le coût associé à ces effets délétères n’est pas négligeable : il s’élèverait à 300 millions d’euros par an.

Pollution, il est urgent d’agir au niveau légal

Les législations ont-elles un impact sur la pollution atmosphérique et ses conséquences ? Oui, si l’on prend l’exemple de la réduction des niveaux de soufre dans les carburants décidée par la législation européenne. Elle s’est traduite par une diminution marquée et pérenne des niveaux de dioxyde de soufre (SO2) dans l’air ambiant. Une amélioration à l’origine de la prévention de près de 2 200 décès prématurés, dont le coût est estimé à 192 millions d’euros dans les 20 villes étudiées.
A la lumière de ces résultats, le rapport Aphekom souligne que “la promulgation et la mise en oeuvre de réglementations efficaces dans le domaine de la pollution atmosphérique se concrétisent par des bénéfices sanitaires et monétaires importants. Ils montrent du même coup l’intérêt qu’il y aurait à réguler les niveaux de pollution atmosphérique à proximité du trafic routier”… en particulier concernant les particules fines principalement issues des moteurs diesel.

Sachant que depuis 2005, différents pays de l’Union européenne dépassent les valeurs limites réglementaires pour les niveaux de particules dans l’air ambiant, l’urgence d’une action législative apparaît réelle. La mise en oeuvre des réglementations actuelles est à l’ordre du jour aux niveaux européen et national et l’Union européenne prépare pour 2013 une révision de la réglementation actuelle.

APHEKOM

 Aphekom apporte un nouvel éclairage sur les effets sanitaires et
économiques de la pollution urbaine en Europe