L’adaptation au changement climatique demande de nouveaux engagements

Edwin Zaccai, professeur et spécialiste du climat de l’Université libre de Bruxelles, nous prévient : l’adaptation au changement climatique va demander de nouveaux apprentissages et collaborations. Il nous transmets le contenu de ces propositions.

L’actuel été des extrêmes dans l’hémisphère Nord a ramené à l’avant-plan, dans les pays européens, la question de l’adaptation au changement climatique. Loin de se stabiliser à court terme, le climat sera continuellement en évolution durant les prochaines décennies. Il pourrait révéler, même dans les pays fortement industrialisés et urbains, une plus grande dépendance des sociétés modernes à son égard qu’on le pense habituellement.

Une fraction de l’adaptation nécessaire à ces changements se produit de façon spontanée, sans apparaître dans des programmes d’action. Mais une large part demande de l’anticipation, de la coordination et de l’apprentissage. Les modalités sont très différentes de celles qui définissent les actions de réduction des émissions de gaz à effet de serre, elles-mêmes laborieusement et insuffisamment développées ces dernières décennies.
Dans le cas de l’adaptation, les incertitudes sont nombreuses. Elles portent sur les impacts climatiques locaux, les objectifs à rechercher et les méthodes à appliquer

Pour commencer, l’objet de la réduction des émissions et celui de l’adaptation sont foncièrement différents.

Dans le premier cas, il s’agit principalement de se concentrer sur les émissions de CO2, tandis que l’adaptation au changement climatique vise une gamme d’activités et d’impacts très diversifiée.

De plus, si des objectifs de réduction sont fixés et qu’il subsiste des incertitudes sur les façons de les atteindre, dans le cas de l’adaptation, les incertitudes sont plus nombreuses. Elles portent à la fois sur les impacts climatiques locaux, les objectifs à rechercher et les méthodes à appliquer. De ce fait, les indicateurs sont encore largement à inventer pour ce que l’on appellerait une adaptation réussie.
Les champs professionnels, et donc de formation, ne se recoupent pas nécessairement dans les deux approches. Pour la réduction des émissions, c’est le monde des ingénieurs, gestionnaires de procédés et de produits, qui est en première ligne. Pour l’adaptation, les acteurs sociaux, les gestionnaires publics locaux, ceux de la santé, de l’aménagement du territoire, sont essentiels.

On peut aussi mettre en évidence un rapport presque inverse à la question des inégalités. Dans le cas de la réduction des émissions, ce sont les plus nantis qui émettent le plus de gaz à effet de serre : à l’échelle de la planète, 10 % de la population serait responsable de 50 % des émissions. Les efforts de réduction devraient logiquement se focaliser davantage sur ces catégories de populations. Face aux impacts climatiques, ces mêmes catégories favorisées auront le plus d’outils en main pour se protéger, tandis qu’une véritable politique d’adaptation doit inclure les catégories les plus démunies, qui sont aussi les plus exposées.

Cette  analyse porte donc essentiellement sur les leviers en mettre en œuvre. L’adaptation émerge aujourd’hui comme une dimension incontournable de la réponse au changement climatique. Complémentaire à l’indispensable réduction des émissions de gaz à effet de serre, ses enjeux restent cependant largement méconnus. À quels risques les sociétés humaines et les écosystèmes vont-ils être confrontés ? Dans quelle mesure l’adaptation peut-elle y répondre ?

L’Adaptation au changement climatique, par Valentine van Gameren, Romain Weikmans et Edwin Zaccai