L’ANSES propose de novelles normes d’expositions professionnelles

L’Anses publie de nouvelles recommandations de valeurs limites d’exposition en milieu professionnel

Depuis 2005, l’Anses est chargée de l’expertise scientifique nécessaire à l’élaboration de valeurs limites d’exposition professionnelle (VLEP) basées sur des critères sanitaires. L’Anses a publié durant le premier semestre 2017 plusieurs rapports d’expertise collective produits dans le cadre de cette mission permanente.

L’avis qu’elle publie ce jour rend compte des recommandations de l’Agence concernant la fixation de valeurs limites atmosphériques pour le trichloroéthylène, le di-n-butylphtalate (DnBP), le butylbenzyl-phtalate (BBzP), le 2-éthoxyéthanol (EGEE), l’acétate de 2-éthoxyéthyle (EGEEA) et le n-butanol.

Par ailleurs, depuis février 2017, l’Agence a également proposé des valeurs limites biologiques pour le chrome hexavalent, l’acrylamide, le di-n-butylphtalate et le butylbenzyl-phtalate.

Certains professionnels peuvent être amenés à inhaler des substances chimiques potentiellement nocives pour leur santé. La prévention du risque chimique sur les lieux de travail se fonde prioritairement sur le principe de la substitution (remplacement d’un produit dangereux par un produit ou un procédé non ou moins nocif) ou à défaut, sur la réduction des concentrations des polluants aux niveaux les plus faibles possibles. Le ministère chargé du travail fixe dans ce contexte des valeurs limites d’exposition professionnelle (VLEP) pour les substances considérées comme dangereuses. Ces valeurs seuils correspondent à des concentrations dans l’air ne devant pas être dépassées sur une période de référence donnée.

Dans le cadre du Plan santé au travail, le ministère du travail a confié à l’Anses la charge de l’expertise scientifique préalable à la fixation des valeurs limites d’exposition en milieu professionnel. Cette phase d’expertise a pour objectif de recommander des niveaux de concentration (atmosphériques ou biologiques) pertinents pour la protection de la santé des travailleurs, mais également les méthodes de mesure adaptées permettant de comparer les expositions professionnelles atmosphériques aux VLEP préconisées.

L’Anses a publié durant le premier semestre 2017 plusieurs rapports d’expertise collective dans le cadre de cette mission permanente. Ces rapports avaient antérieurement donné lieu à consultation publique. Les recommandations de l’Agence ont désormais vocation à être discutées au sein des instances paritaires du ministère chargé du travail en vue de la fixation de valeurs limites d’expositions professionnelles réglementaires.

Recommandations pour la fixation de nouvelles valeurs limites atmosphériques

L’Agence propose des valeurs limites atmosphériques basées sur une évaluation scientifique des effets sanitaires pour  6 substances :

Pour le trichloroéthylène :
  • recommandation d’une VLEP-8h pragmatique de 40  mg.m-3 (au lieu de la valeur de 405 mg.m-3 fixée par une circulaire de 1983) afin de prévenir de la néphrotoxicité de cette substance. La VLEP-8h recommandée n’a pas pour objectif de protéger des effets cancérogènes du trichloroéthylène, mais constitue ici uniquement un outil pour limiter les niveaux d’exposition sur les lieux de travail ;
  • ne pas dépasser sur une période de 15 minutes la concentration correspondant à 5 fois celle recommandée pour la VLEP-8h ;
Pour le di-n-butylphtalate (DnBP) :
  • recommandation d’une VLEP-8h de 2 mg.m-3 (au lieu de la valeur de 5 mg.m-3 fixée par une circulaire de 1987) afin de prévenir des effets reprotoxiques de cette substance ;
  • ne pas dépasser sur une période de 15 minutes la concentration correspondant à 5 fois celle recommandée pour la VLEP-8h ;
 Pour le butylbenzyl-phtalate (BBzP) :
  • recommandation d’une VLEP-8h de 13 mg.m-3 (pas de valeur existante actuellement) afin de prévenir des effets reprotoxiques de cette substance ;
  • ne pas dépasser sur une période de 15 minutes la concentration correspondant à 5 fois celle recommandée pour la VLEP-8h ;
Pour le 2-éthoxyéthanol et l’acétate de 2-éthoxyéthyle (EGEE et EGEEA) :
  • recommandation d’une VLEP-8h de 1 ppm afin de prévenir de l’hématoxicité de ces substances (au lieu de la valeur de 2 ppm fixée par un décret de 2012) ;
  • ne pas dépasser sur une période de 15 minutes la concentration correspondant à 5 fois celle recommandée pour la VLEP-8h ;
Pour le n-butanol :
  • recommandation d’une valeur limite court terme (VLCT-15min) de 100 mg.m-3 (au lieu de la valeur de 150 mg.m-3 fixée par une circulaire de 1982) afin de prévenir des effets d’irritation oculaire.

Par ailleurs, l’attribution de la mention « peau », indiquant la nécessité de prendre en compte l’exposition par voie cutanée pour l’évaluation de l’exposition à la substance chimique, est recommandée pour le trichloroéthylène, le butylbenzyl-phtalate, le 2-éthoxyéthanol et son acétate correspondant.

Concernant les recommandations de méthodes de mesure de ces 6 substances dans l’air des lieux de travail, l’Anses souligne qu’aucune méthode de mesure n’a pu être recommandée pour le butylbenzyl-phtalate.

Les autres travaux de l’Agence : propositions de valeurs limites biologiques

En complément de ces différentes recommandations de valeurs limites atmosphériques, depuis début 2017, l’Anses a également recommandé des valeurs limites biologiques (VLB) et des valeurs biologiques de référence (VBR) afin d’améliorer le suivi de l’exposition des travailleurs au chrome hexavalent et à ses composés, à l’acrylamide, au di-n-butylphtalate et au benzylbutyl-phtalate.

Ainsi, pour la surveillance biologique des expositions professionnelles, l’Agence  recommande :

Pour le chrome hexavalent et ses composés :
  • une VLB pour le chrome urinaire de 2,5 µg.L-1 ou 1,8 µg.g-1 de créatinine correspondant à une exposition à la VLEP-8h pour le chrome hexavalent de 1 µg.m-3. Cependant, comme cette valeur n’a été établie qu’à partir d’études menées dans un seul type de secteur industriel, le secteur du chromage, l’application de cette VLB n’est recommandée que pour des expositions à des composés du chrome hexavalent. En cas d’expositions mixtes (au chrome hexavalent et trivalent) et compte tenu de la contribution des expositions du chrome trivalent aux concentrations de chrome urinaire, des mesures urinaires pourront être réalisées mais devront être interprétées à la lumière des niveaux respectifs des concentrations atmosphériques des différents composés du chrome ;
  • une VBR pour le chrome urinaire de 0,65 µg.L-1 (ou 0,54 µg.g-1 de créatinine), ;
Pour l’acrylamide :
  • une VBR pour les adduits de l’acrylamide à l’hémoglobine (mesurés dans le sang) de 85 pmol.g-1 de globine pour les non-fumeurs et de 285 pmol.g-1 de globine pour les fumeurs.
Pour le di-n-butylphtalate :
  • Une VBR pour le mono-n-butylphtalate (MnBP) urinaire de 70 μg.L-1 ou 50 µg.g-1 de créatinine.
Pour lebutylbenzyl-phtalate :
  • une VBR pour le mono-benzylphtalate (MBzP) urinaire de 40 μg.L-1 ou 30 µg.g-1 de créatinine.

L’Agence rappelle que la substitution des substances cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction par des substances ou des procédés moins nocifs est une démarche prioritaire pour la prévention du risque chimique sur les lieux de travail en France. Cette démarche prioritaire de substitution doit donc être appliquée au trichloroéthylène, au di-n-butylphtalate, au butylbenzyl-phtalate, au 2-éthoxyéthanol et à l’acétate de 2-éthoxyéthyle, au chrome hexavalent et à ses composés et à l’acrylamide.

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