Rapport 2013 de l’autorité de sureté nucléaire (ASN)

L’Autorité de sûreté nucléaire présente son Rapport sur l’état de la sûreté nucléaire et de la ­radioprotection  en France en 2013.

Ce rapport est prévu par l’article L. 592.31 du code de l’environnement.

Rapport de l’ASN 2013 :  Rapport-annuel 2013.asn.fr

La sûreté nucléaire et la radioprotection en France en 2013                                

Il a été remis au Président de la République, au Premier ministre  et aux Présidents du Sénat et de l’Assemblée nationale,  en application de l’article précité.

     Nous relayons une analyse faite sur le  blog d’un vice-Président de l’assemblée nationale qui a eu présentation de ce rapport :

Blog de Denis Baupin – 22/04/2014 12:50:00


Le rapport 2013 de l’Autorité de Sûreté Nucléaire porte un jugement sans appel sur la sûreté du parc nucléaire : celle-ci n’a pas progressé ! Comme l’an passé, l’ASN estime celle-ci « globalement assez satisfaisante », une appréciation dont Pierre-Franck Chevet, Président de l’ASN, reconnaissait déjà l’an passé qu’il « n’aurait pas été fier » de l’avoir sur son bulletin de note.

Denis Baupin, Vice-Président de l’Assemblée Nationale, membre de l’OPECST et rapporteur de la commission d’enquête sur les coûts du nucléaire estime que : « Ce rapport vient confirmer la fragilité de la sûreté nucléaire française, alors même que l’ASN confirme qu’un accident grave est possible dans notre pays. Il souligne la vulnérabilité de notre système électrique, l’absence de solution sûre pour les déchets radioactifs, et la perspective incertaine des réacteurs en activité, alors même que ceux-ci, de plus en plus difficiles à entretenir, arrivent en fin de vie. Le Président de l’ASN lui-même a souligné que nous sommes face à un « enjeu sans précédent ». Ce rapport confirme l’urgence que l’Etat se saisisse enfin de la transition énergétique pour sortir de cette mono-industrie dangereuse, investir massivement dans l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables et fermer progressivement les installations nucléaires. »

L’ensemble du rapport est en effet à l’image de son jugement global : les critiques, toujours formulées dans ce style policé inimitable, abondent sur l’état réel du parc.

En ce qui concerne la maintenance des centrales, l’ASN estime « Cette situation révèle une maîtrise insuffisante des opérations de maintenance (…) Elle peut avoir des impacts défavorables, par la désorganisation qu’elle entraîne, sur la qualité des opérations de maintenance elles-mêmes, de la préparation du redémarrage des réacteurs à l’issue de leur arrêt (…) ». Ou encore « L’ASN relève encore en 2013, sur plusieurs sites, de nombreuses insuffisances qui concernent la disponibilité du matériel, les documents opérationnels et les interfaces hommes-machines ».

Sur les doses reçues par les personnels – dont il faut rappeler que 80% sont reçues par les sous-traitants – l’ASN estime que « la dosimétrie collective par réacteur a augmenté d’environ 18% par rapport à l’année 2012 (…) plus importante que prévu ». Sur l’organisation des installations : « l’ASN juge que la prise en compte des facteurs humains dans les activités d’exploitation et de maintenance est hétérogène en fonction des sites et reste perfectible ».

Tout cela amène l’ASN à demander « à EDF de lui présenter un plan d’action correctif » « dans la perspective des programmes de maintenance très conséquents associés aux arrêts des 3ème visites décennales et du « Grand Carénage » ». Plusieurs sites sont particulièrement pointés du doigt : Chinon, Bugey, Civaux, Cattenom, Belleville, Chooz.

L’ASN profite aussi de son rapport pour « rappeler que l’éventuelle poursuite du fonctionnement des réacteurs actuels au-delà du quatrième réexamen décennal de sûreté (NDLR : les 40 ans de durée de vie) n’est nullement acquise ». Elle ajoute : « La prolongation de la durée de fonctionnement des réacteurs est également conditionnée à une réévaluation de sûreté ambitieuse visant à atteindre un niveau le plus proche possible de celui d’un nouveau réacteur » à savoir l’EPR, ce qui ne pourra qu’entraîner des coûts d’investissement très élevés.

Elle rappelle aussi la vulnérabilité du système électrique français « pour faire face à la nécessité de suspendre simultanément le fonctionnement de plusieurs réacteurs qui présenteraient un défaut générique grave ».

En ce qui concerne le stockage des déchets « l’ASN ne pourra prendre position sur un projet particulier (NDLR : CIGEO) qu’après que la démonstration de sa sûreté aura été apportée »… sous-entendu : elle n’y est pas ! L’ASN ajoute d’ailleurs qu’elle « restera vigilante à ce que le programme de recherche que l’ANDRA mène, notamment au laboratoire de Bure, lui permette de disposer d’éléments nécessaires en vue de la remise éventuelle d’un dossier de demande d’autorisation de création ». Autrement dit : la phase de recherche doit se poursuivre au sein du laboratoire avant de passer à un projet de site d’enfouissement.

On notera par ailleurs, au détour d’un commentaire portant sur le réacteur OSIRIS cet avis sur l’activité du CEA qui se passe de commentaire : « Ce cas illustre les difficultés récurrentes du CEA à respecter ses engagements » !

Une fois de plus, l’Autorité de Sûreté Nucléaire démontre par ce rapport sa capacité à émettre une parole indépendante sur la sûreté nucléaire. Raison de plus pour que la loi de transition énergétique lui donne les moyens humains, financiers et juridiques d’exercer au mieux sa mission dans la durée.

Denis Baupin  Vice-Président de l’Assemblée nationale