La santé publique n’est pas prioritaire aux yeux de l’Union européenne

L’Union Europénne a abandonné les lois sur les pesticides en raison de la pression américaine en relation avec le TTIP (traité de libre échange transatlantique en cours de négociations), comme le révèle des documents

Le projet de l’UE de réglementer les produits chimiques hormono-perturbateurs liés au cancer et l’infertilité masculine a été repoussé sous la pression de responsables américains du commerce dans le cadre des discussions sur
l’accord de libre-échange, le partenariat transatlantique sur le commerce et l’investissement (TTIP) [autrement dit TAFTA], comme le montrent des documents récemment publiés.
Le projet de l’UE consistait à définir une liste de critères qui auraient interdit 31 pesticides contenant des perturbateurs endocriniens (PE). Mais ceux-ci ont été délaissés dans la crainte de représailles commerciales, suite à des pressions agressives de lobbys américains, comme en témoigne l’accès aux documents d’information obtenus par Pesticides Action Network (PAN) Europe.


Le résultat a été que la législation prévue pour 2014 a été repoussée jusqu’à au moins 2016, malgré des coûts estimés pour la santé de 150 milliards par an en Europe due aux affections endocriniennes, telles que la perte de QI, l’obésité et la cryptorchidie une maladie qui affecte les organes génitaux de bébés garçons.

Pour Bas Eikhout, député européen Vert, ces faits sont « incroyables ». « Ces documents montrent de façon convaincante que le TAFTA non seulement représente un danger pour l’avenir en baissant les normes de l’Europe, mais qu’en plus, cela se produit déjà au moment où nous parlons » affirmait-il au journal “Guardian”.

.pesticides non merci

Suite aux révélations du Guardian sur l’étendue du lobbying de l’industrie menant à l’abandon des critères, 64 députés déposaient, cette année, une question à la Commission à propos des retards sur la classification des perturbateurs endocriniens. La Suède , le Parlement européen et le Conseil européen ont déposé des recours contre la Commission et ce blocage législatif.

Juste quelques semaines avant que ces règlementations ne soient abandonnées, il y a eu un tir de barrage par des firmes européennes comme Dupont, Bayer, BASF au sujet des perturbateurs endocriniens. L’association des industries chimiques, Cefic, prévenait que le problème des perturbateurs endocriniens « pouvait devenir un problème qui bloque l’avancée des négociations entre les Etats-Unis et l’Union européenne ».

Le géant de la chimie, BASF, dénonçait le fait que l’interdiction des pesticides « allait réduire le libre échange des produits agricoles au niveau mondial ».

Au même moment, le département de l’agriculture, très pro-industrie de la Commission, pesait sur le débat interne de l’Union européenne après avoir été « informé par des représentants de l’industrie chimique des Etats-Unis ».

Un thème qui revenait dans les lettres de lobbying évoquait le besoin de fixer des seuils sans danger d’exposition aux perturbateurs endocriniens, même si les preuves scientifiques s’accumulent pour suggérer que le modèle linéaire des seuils – dans lequel des doses plus élevées provoquent des effets plus importants – ne convient pas aux perturbateurs endocriniens.

« Le système endocrinien humain est régulé par les hormones et les récepteurs hormonaux sont sensibles aux faibles doses. »explique Hans Muilerman, coordinateur de PAN Europe. « Dans les études de toxicité sur les animaux, les effets sont observés à faibles doses mais disparaissent à des doses plus fortes. Mais dans le domaine règlementaire, les faibles doses ne sont pas testées ».

Un porte-parole de la Commission insistait sur le fait que les inquiétudes concernant la santé et l’environnement seraient entièrement prises en compte, malgré les pressions de l’industrie ou des groupes commerciaux.Affaire à suivre !